Regroupement de crédits et information de l’emprunteur : pas de déchéance du droit aux intérêts pour défaut d’information par le prêteur

Thomas LAILLER
Thomas LAILLER

Source : Cass. civ. 1ère, 9 janvier 2019, n°17-20.565, FS-PB

 

I – Rappel des textes en question

 

Les anciens articles L.315-15 et R.313-12 et suivants du Code de la consommation, aujourd’hui L.314-14 et R.314-19 et suivants, prévoient en substance que le prêteur qui procède à un regroupement de crédits à la demande d’un emprunteur est tenu de l’informer, et il doit notamment lui remettre un document comportant un certain nombre d’informations spécifiques sur l’opération projetée.

 

Selon l’ancien article L.312-33 du Code de la consommation, désormais article L.341-34, le prêteur peut être déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge, en cas de non-respect des différentes obligations visées par cet article.

 

II – Les faits

 

Une banque consent un prêt d’un montant destiné au refinancement de plusieurs crédits contractés pour l’acquisition et la rénovation d’un bien immobilier. Après avoir prononcé la déchéance du terme, l’établissement bancaire délivre à ses clients un commandement de payer valant saisie immobilière, puis l’assigne à l’audience d’orientation.

 

À titre reconventionnel, les débiteurs sollicitent, sur le fondement de l’article L. 312-33, alinéa 5, du Code de la consommation dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2014-344 du 17 mars 2014, la déchéance de la banque à son droit aux intérêts conventionnels, invoquant un manquement à son obligation d’information en matière de regroupement de crédits, prévue aux articles R. 313-12 et suivants du même code, dans leur rédaction antérieure au décret n° 2016-884 du 29 juin 2019.

 

Les débiteurs voient leur demande rejetée.

 

III – Le pourvoi en cassation

 

La Haute juridiction est saisie de la question, et plus spécialement de nous dire si les dispositions évoquées ci-avant s’appliquent au regroupement de crédit. La Cour de cassation interprète strictement les textes : l’ancien article L.312-33 du Code de la consommation n’incluait pas dans son dispositif de sanction civile les articles relatifs au devoir d’information du prêteur en matière de regroupement de crédits, de sorte qu’en cas de non-respect de cette obligation, le prêteur n’est pas déchu du droit aux intérêts contractuels.

 

La Cour de cassation avait déjà précisé que la déchéance du prêteur du droit aux intérêts prévue par les ex-articles L.311-33 et L.312-33 du Code de la consommation en matière de crédit à la consommation ou de crédit immobilier ne s’applique qu’aux irrégularités ou manquements expressément visés par ces textes .

 

C’est semble-t-il la première fois que la Haute juridiction exclut cette sanction en cas de manquement du prêteur à son obligation particulière d’information en matière de regroupement de crédits. Cette exclusion, d’interprétation stricte, ici affirmée à propos d’un regroupement de crédits immobiliers, pourra s’étendre aussi aux regroupements de crédits à la consommation.

 

IV – Et après la recodification du Code de la consommation ?

 

La recodification du Code de la consommation par l’ordonnance 2016-301 du 14 mars 2016 ne change pas la donne, car elle a été faite à droit constat. Si de nombreuses dispositions prévoient la déchéance du droit aux intérêts conventionnels (art. L.341-2 à L.341-7 pour le crédit à la consommation, art. L.341-25 à L.341-28, L.341-34 et L.341-45 pour le crédit immobilier), aucune ne vise le non-respect de l’obligation particulière d’information due en cas de regroupement de crédits.

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