Le recours systématique aux heures supplémentaires constitue une modification du contrat de travail.

Thomas T’JAMPENS
Thomas T’JAMPENS

SOURCE : Arrêt de la Cour de cassation du 8 septembre 2021, n°19-16.908, FS-B

 

Un salarié se voyait imposait, conformément à l’horaire collectif en vigueur dans l’entreprise, chaque semaine la réalisation de 4 heures supplémentaires.

 

A plusieurs reprises, le salarié avait quitté son poste sans effectuer l’heure supplémentaire demandée par son employeur, motif pour lequel il était sanctionné par 3 avertissements et une mise à pied disciplinaire de 2 jours.

 

Par suite, constatant que le salarié persistait à se soustraire à ses directives, l’employeur lui notifiera son licenciement pour faute grave.

 

Le salarié saisira le conseil de prud’hommes en annulation des différentes sanctions disciplinaires, mais également en vue d’obtenir la requalification de son licenciement en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

 

A l’appui de ses demandes de condamnation, le salarié soutenait que la durée du travail, telle que mentionnée au sein de son contrat de travail, constituait en principe, un élément du contrat de travail qui ne pouvait être modifié sans son accord du salarié ; de sorte que le recours systématique par son employeur à des heures supplémentaires modifiait sans son consentement son contrat de travail.

 

En conséquent, il ne pouvait lui être reproché une inexécution fautive de sa prestation de travail.

 

Par principe et en l’absence de clause contractualisant les horaires de travail, ceux-ci relèvent, en principe, du pouvoir de direction de l’employeur et leur modification constitue un simple changement des conditions de travail qui doit s’imposer au salarié.

 

Ainsi, le recours aux heures supplémentaires peut être imposé par l’employeur, dans la limite du contingent dont il dispose légalement et en raison des nécessités de l’entreprise, ces dernières ne constituant donc pas une modification du contrat de travail.

 

Il a d’ailleurs été jugé[1] que lorsque le contrat de travail ne garantit pas un nombre précis d’heures supplémentaires, l’employeur peut réduire ou supprimer les heures supplémentaires effectuées par le salarié, sans qu’il puisse se prévaloir d’une modification du contrat de travail.

 

Toutefois, la cour d’appel fait droit aux demandes du salarié, considérant que l’employeur ne pouvait valablement modifier le contrat de travail en augmentant sa durée hebdomadaire de travail et, par voie de conséquence ses horaires, qu’avec son accord exprès, et que faute pour lui de l’avoir fait, il n’était pas fondé à soutenir que le fait pour le salarié de quitter son travail à l’horaire prévu par son contrat caractérisait de sa part une inexécution fautive de sa prestation de travail.

 

L’employeur forme alors un pourvoi, s’attachant à démontrer que le recours habituel aux heures supplémentaires relevait de son pouvoir de direction, de sorte qu’en s’y soustrayant le salarié était fautif et pouvait être sanctionné.

 

La Cour de cassation confirme pourtant la décision des juges d’appel, affirmant que le recours systématique aux heures supplémentaires excède le pourvoir de direction de l’employeur et constitue une modification de la durée du travail du salarié et donc de son contrat de travail, laquelle exige de recueillir son accord exprès.

 

A défaut d’accord du salarié, le refus de cette modification n’est pas fautif de sorte que son licenciement ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse.

 

[1] Cass. soc., 02 novembre 2005, n° 03-47.679, F-D

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