Congé du bailleur en période de tacite prolongation et délai pour agir

Alexandre BOULICAUT
Alexandre BOULICAUT - Juriste

Source : Cass. Civ 3ème, 23/09/2021, n°20-10.026, Inédit

 

I –

 

Dans les faits, une société preneuse bénéficie d’un bail commercial dont le terme est fixé au 30 septembre 2013. La société bailleresse notifie un congé à effet du 31 décembre 2013 avec offre d’une indemnité d’éviction.

 

Le 11 mai 2016, la société bailleresse assigne la société preneuse aux fins de voir constater l’acquisition de la prescription biennale et de voir condamner son expulsion.

 

La société preneuse fait quant à elle valoir que la prescription biennale n’était pas acquise et a sollicité le paiement d’une indemnité d’éviction.

 

II –

 

La société preneuse fait grief à l’arrêt d’ordonner son expulsion alors que l’article L.145-9 du code de commerce dispose que (i) le bailleur peut donner congé jusqu’à six mois avant la date d’échéance contractuelle du bail, (ii) qu’à défaut de congé ou d’une demande de renouvellement, le bail se poursuit par tacite prolongation au-delà du terme fixé par les parties. Au cours de la tacite prolongation, le congé doit être donné au moins six mois à l’avance et pour le dernier jour du trimestre civil.

 

Il en résulte que le bailleur ne dispose pas de la possibilité de donner congé au cours de la période de six mois précédant la date d’échéance contractuelle du bail.

 

Cet avis n’a pas été suivi par la Cour d’appel, puisque celle-ci a jugé :

 

« Qu’aucun texte n’interdit au bailleur de délivrer congé pendant les six derniers mois du bail, si bien que dans cette hypothèse, puisqu’il est impossible au bailleur de respecter un délai de six mois avant le terme du bail, le congé ne peut être délivré qu’avec une date d’effet au cours de la tacite prolongation du bail et dans ce cas faute de date contractuellement fixée ce ne peut être que pour le dernier jour du trimestre civil, suivant l’expiration du délai de six mois ».

 

Pour l’appelante, la Cour d’appel, qui en a déduit que le congé délivré par la société bailleresse le 28 juin 2013, soit moins de six mois avant l’échéance contractuelle du 30 septembre 2013, aurait été valablement donné pour le 31 décembre 2013 et qu’en conséquence, le délai de deux ans pour agir en contestation du congé aurait pris fin le 31 décembre 2015, a violé les dispositions du Code de commerce susvisées.

 

III –

 

La troisième chambre civile rejette le pourvoi aux motifs qu’ :

 

« A défaut d’une demande ou d’une défense pouvant s’analyser comme une contestation, dans le délai de deux années suivant la date, fût-elle erronée, pour laquelle il est délivré, le congé produit ses effets à la date indiquée ».

 

Dans ces conditions, le congé ayant été délivré pour le 31 décembre 2013, la société preneuse avait jusqu’au 31 décembre 2015 pour agir ; toute action introduite postérieurement est irrecevable.

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