Cautionnement, irrégularité d’une déclaration de créance et pouvoir du juge du fond

Thomas LAILLER
Thomas LAILLER

Source : Cass. com., 5 mai 2021, n° 19-17.736, n° 447 P

 

I – Les faits

 

Par des actes sous seing privé des 3 septembre 2012 et 29 mai 2013, une banque consent à une société des prêts garantis par plusieurs cautionnements. Le 3 avril 2015, ladite société est mise en redressement judiciaire, procédure convertie en liquidation judiciaire le 15 juillet suivant. La banque assigne les cautions en paiement et obtient, en appel, leur condamnation au paiement d’une certaine somme.

 

II – Le pourvoi

 

Les cautions condamnées forment un pourvoi en cassation dont le moyen reproche, en substance, aux juges d’appel de ne pas avoir tiré les conséquences de l’irrégularité de la déclaration de créance de la banque (la cour d’appel l’ayant jugée irrégulière pour absence de justification de la délégation de pouvoir du préposé déclarant) en refusant d’en déduire l’extinction de ladite créance et donc de la sûreté qui la garantit, en application de l’article L.622-24 du Code de commerce et de l’article 2289 du Code civil.

 

Le juge saisi d’un litige entre le créancier et la caution du débiteur en procédure collective peut-il s’arroger les pouvoirs d’un juge-commissaire ?

 

La décision par laquelle le juge-commissaire retient qu’une créance a été irrégulièrement déclarée et ne peut être admise au passif est une décision de rejet de la créance entraîne effectivement l’extinction de la sûreté qui la garantit[1].

 

La Cour de cassation rejette le pourvoi, en énonçant que « le juge du fond, qui statue dans l’instance en paiement opposant le créancier à la caution du débiteur principal à l’égard duquel a été ouverte une procédure collective, ne fait pas application de l’article L. 624-2 du Code de commerce. Il en résulte que la décision par laquelle le juge du cautionnement retient que la déclaration de la créance est irrégulière ne constitue pas une décision de rejet de cette créance, entraînant, dès lors, l’extinction de celle-ci ».

 

Le juge du fond ne peut se prononcer sur la régularité de la déclaration de créance, tâche exclusivement dévolue au juge commissaire, puis la cour d’appel sur recours formé contre sa décision[2].

 

Cette solution est à rapprocher d’un arrêt récent[3] disant pour droit que « le juge du fond, qui statue dans une instance en cours reprise conformément à l’article L. 622-22 du code de commerce, ne fait pas application de l’article L. 624-2 du même code. Il en résulte que la décision par laquelle ce juge déclare irrecevable la demande d’un créancier tendant à la fixation du montant de sa créance ne constitue pas une décision de rejet de cette créance entraînant, dès lors, l’extinction de celle-ci ».

 

[1] Cass. com., 4 mai 2017, n° 15-24.854

 

[2] Cass. com., 26 mars 2013, n° 11-24.148

 

[3] Cass. com., 10 mars 2021, n° 19-22.395

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