La responsabilité de l’administrateur d’une page Facebook peut être recherchée en cas de propos diffamatoires.

Vianney DESSENNE
Vianney DESSENNE - Avocat

Source : Cour d’appel de Paris, 4ème ch. de l’instruction, arrêt du 13 novembre 2020

 

Une plainte avec constitution de partie civile avait été déposée du chef de diffamation publique envers un particulier, à raison de propos publiés sur la page du réseau social Facebook d’une association.

 

Une information judiciaire avait été ouverte du chef visé dans la plainte contre personne non dénommée.

 

Les recherches s’étaient avérées vaines pour identifier l’auteur des propos litigieux, notamment du fait du défaut de collaboration de la société Facebook, laquelle n’avait pas répondu aux sollicitations des enquêteurs.

 

L’administrateur de cette page Facebook, qui reconnaissait cette qualité et n’était autre que le président de cette association, niait être l’auteur des propos poursuivis.

 

Il précisait que tous les membres l’association qu’il présidait avait la possibilité de publier des contenus sur la page en cause, les codes d’accès de cette dernière étant sauvegardés sur l’ordinateur présent dans le local de l’association.

 

Il ajoutait avoir supprimé ladite publication dès qu’il en avait eu connaissance.

 

Le ministère public délivrait des réquisitions de non-lieu, suivies d’une ordonnance conforme du juge d’instruction : celle-ci était motivée par le fait que l’article 93-3 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle exclut la responsabilité pénale du directeur de la publication :

 

  lorsque l’infraction résulte du contenu d’un message adressé par un internaute à un service de communication au public en ligne et mis par ce service à la disposition du public à travers un espace de contributions personnelles ; 

 

  et s’il est établi que le directeur de la publication n’avait effectivement pas connaissance du message avant sa mise en ligne ou si, dès le moment où il en avait eu connaissance, il avait agi promptement pour retirer ce message.

 

Toutefois, l’affaire ne s’arrêtait pas là dès lors qu’un appel de l’ordonnance de non-lieu du juge d’instruction était interjeté.

 

Dans son arrêt en date du 13 novembre 2020, la Cour d’appel de Paris relève que, si dans le système de responsabilité dit « en cascade » instaurée par l’article 93-3 précité, l’exonération de responsabilité vise un message adressé par un internaute à un service de communication au public en ligne et mis par ce service à la disposition du public dans un espace de contributions personnelles, tel n’était pas le cas en l’espèce dès lors que l’article litigieux n’était pas un message adressé par un internaute sur la page Facebook de l’association mais était publié dans l’interface d’administration de ladite page.

 

Par ailleurs, étant rappelé qu’à défaut d’identification de l’auteur, la responsabilité pénale du producteur peut être recherchée, la Cour considère qu’il appartenait au juge d’instruction de déterminer si le président de l’association, administrateur de la page litigieuse, avait la qualité de producteur.

 

Dans l’affirmative, celui-ci pouvait être poursuivi pour des propos diffamatoires postés sur cette page si leur auteur demeure inconnu.

 

Fort de ce raisonnement, la Cour infirmait l’ordonnance de non-lieu.

 

Pour rappel en matière de communication au public en ligne, le régime particulier de responsabilité dit « en cascade » vise successivement le directeur de la publication, à défaut l’auteur (qui peut toujours être poursuivi comme complice si le directeur de la publication est mis en cause), et à défaut le producteur.

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