La recevabilité de la constitution du Comité Social et Economique en qualité de partie civile par un membre mandaté.

Thomas T’JAMPENS
Thomas T’JAMPENS

SOURCE : Arrêt de la chambre criminelle de la Cour de cassation du 9 septembre 2020, n°19-83.139 – F-P+B+I

 

Le trésorier d’un Comité d’Entreprise est poursuivi par les juridictions pénales pour des faits d’abus de confiance au préjudice de l’entité, notamment pour avoir détourné des fonds (achats personnels, retrait d’espèce).

 

A l’occasion de cette audience, le comité d’entreprise a entendu se constituer partie civile aux fins d’obtenir réparation de son préjudice financier et moral.

 

Le tribunal correctionnel a déclaré irrecevable cette constitution au motif que la personne physique muni du mandat de représentation n’en était plus membre au moment de l’audience.

 

Se pose ici, la question de l’exercice d’une action en justice par le C.S.E puisqu’en vertu des principes généraux de la procédure civile, une action en justice est subordonnée à l’ « existence juridique » de celui qui veut l’intenter.

 

Il résulte de l’article L. 2315-23 que le comité social et économique, dans les entreprises d’au moins 50 salariés, est doté de la personnalité morale dans la mesure où l’entité dispose de droits distincts de ceux de ses membres. Il dispose ainsi du droit de de passer des actes juridiques en son nom, même si ces actes sont passés par l’intermédiaire d’une personne physique, membre du comité ; à condition de respecter l’objet[1] du comité :

 

  Présenter à l’employeur les réclamations individuelles ou collectives relatives aux salaires, à l’application du code du travail et des autres dispositions légales concernant notamment la protection sociale, ainsi que des conventions et accords applicables dans l’entreprise ;

 

  Assurer une expression collective des salariés permettant la prise en compte permanente de leurs intérêts dans les décisions relatives à la gestion et à l’évolution économique et financière de l’entreprise, à l’organisation du travail, à la formation professionnelle et aux techniques de production.

 

La Cour d’appel retient que le comité d’entreprise s’est valablement constitué partie civile au stade de l’instruction préparatoire.

 

La Cour en déduit à tort que les effets de cette constitution perdurent devant le tribunal correctionnel puisque le comité a d’ailleurs été cité à comparaître par le procureur de la République en la qualité de partie civile à l’audience du tribunal correctionnel et qu’il était représenté par un avocat.

 

Toutefois, la Cour de cassation n’est pas de cet avis, puisque sur le fondement des articles 2 et 3 du code de procédure pénale et L. 2325-1 du code du travail elle en déduit que :

 

“l’action civile en réparation du dommage directement causé au comité d’entreprise par un crime, un délit ou une contravention doit être exercée par l’un de ses membres régulièrement mandaté à cet effet”.

 

En effet, il résulte des articles 2 et 3 du Code de procédure pénale que l’action civile en réparation du dommage causé par un crime, un délit ou une contravention appartient à tous ceux qui ont personnellement souffert du dommage directement causé par l’infraction. De sorte, que c’est un membre actuel du C.S.E qui doit le représenter pour exercer une telle action.

 

La Cour d’appel devait donc rechercher si la salariée mandatée pour représenter le comité d’entreprise en était toujours membre.

 

Dans une telle hypothèse, il convient donc de s’assurer à chaque étape de la procédure pénale, de la régularité du mandat du représentant de l’entité. A défaut le C.S.E ne pourra obtenir réparation de son préjudice sur le plan pénal.

 

En effet, le mandat ad litem délivré à l’avocat du comité pour le représenter est distinct de celui devant être délivré à la personne désignée par le comité pour le représenter en justice.

 

La Jurisprudence[2] a toutefois accepté que le mandat de représentation en justice ne soit pas nominatif mais puisse faire référence à une fonction au sein du Comité.

 

[1]  Articles L. 2312-5 du Code du travail (entreprises d’au moins 11 salariés et de moins de 50 salariés) et L. 2312-8 du Code du travail (pour les entreprises d’au moins 50 salariés)

 

[2] Cass. soc., 19 nov. 1986, n° 85-11.357

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