Société de droit étranger et établissement stable en France non déclaré

Caroline DEVE
Caroline DEVE - Avocat

Source : CE 18/03/2019 n°410573, mentionné sur les tables du recueil Lebon

 

Une société de droit étranger ayant un établissement stable en France (c’est-à-dire une installation fixe d’affaires par l’intermédiaire de laquelle elle exerce tout ou partie de son activité) est redevable, à ce titre, de l’impôt français (TVA, IS, CFE…).

 

En l’espèce, une société de droit luxembourgeois exerçait une activité en France mais n’avait pas déposé, à ce titre, de déclarations fiscales de sorte qu’ont été mis à sa charge des suppléments d’impôts au titre de 7 exercices et assortis d’une pénalité de 80%.

 

Elle sollicitait la décharge au motif qu’elle avait rempli ses obligations fiscales afférentes à son activité française au Luxembourg.

 

Le Conseil d’Etat se prononce d’une part sur le délai de reprise spécial de 10 ans en cas d’activité occulte et d’autre part sur la pénalité de 80%.

 

Sur le délai de reprise

 

Les articles L. 169 et L. 176 du Livre des Procédures Fiscales prévoient, pour l’impôt sur les sociétés et la taxe sur la valeur ajoutée respectivement, que le droit de reprise de l’administration fiscale s’exerce, par exception à la règle de droit commun, jusqu’à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l’imposition est due lorsque le contribuable exerce une activité occulte c’est-à-dire lorsque « le contribuable n’a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu’il était tenu de souscrire et soit n’a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, soit s’est livré à une activité illicite ».

 

Le contribuable peut s’exonérer s’il établit avoir commis une erreur justifiant l’absence de toute déclaration.

 

Dans le cas où un contribuable indique avoir rempli ses obligations dans le pays de son siège, le Conseil d’Etat juge que la prise en compte de l’erreur invoquée par le contribuable « doit être appréciée en tenant compte tant du niveau d’imposition dans cet autre État que des modalités d’échange d’informations entre les administrations fiscales des deux Etats ».

 

Au cas d’espèce, dans la mesure où la convention franco luxembourgeoise n’offre qu’une possibilité restreinte d’échange entre les administrations fiscales, le Conseil d’Etat estime que la société de droit étranger ne peut être considérée comme établissant avoir commis une erreur.

 

Il ajoute en outre que les juges du fond ne sont pas tenus « de rechercher si les modalités d’échange d’informations entre les autorités françaises et luxembourgeoises avaient été de nature à faire obstacle en l’espèce à l’établissement des rectifications prononcées ».

 

Sur la pénalité  de 80%

 

Si un contribuable ne souscrit pas de déclaration dans les délais légaux, il est s’expose à l’application d’une majoration qui s’élève à 80% en cas d’activité occulte.

 

C’est à l’administration fiscale d’apporter la preuve de cette activité occulte. Néanmoins, elle est réputée apporter cette preuve si le contribuable n’est pas en mesure d’établir qu’il a commis une erreur justifiant le fait qu’il n’a acquitté aucune de ses obligations fiscales.

 

En l’espèce, le Conseil d’Etat reprend le même critère d’appréciation que pour le délai de reprise de sorte qu’il rejette le pourvoi de la société de droit étranger.

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